[Endométriose] Mon parcours

Au Salon du Livre de Genève 2023, je mange du riz et du poulet depuis une semaine dans l’espoir de calmer les crises digestives. J’apprendrai plus tard que l’endométriose ne fonctionne pas comme une gastro. 8D

Tous les articles liés à celui-ci :
–> Introduction à la série d’articles sur l’endométriose
–> Symptômes courants de l’endométriose
–> Intégrer et accepter mon endométriose dans le processus d’écriture

Chers amis des mots,

Je vous retrouve cette semaine pour partager avec vous mon témoignage sur l’endométriose et l’adénomyose. Attention, ça va être long ! Si vous ne connaissez pas, je vous invite à consulter mon article introductif sur le sujet ainsi que mon article sur les symptômes courants.

Avant de commencer, je précise qu’il ne s’agit ici que de mon vécu. Il faut savoir que je suis genevoise et que le système de santé correspondant sera ma référence. Également, je dispose d’une assurance complémentaire semi-privée depuis 17 ans, ce qui m’a permis l’accès à certaines cliniques du canton.
Je tiens aussi à dire que j’ai conscience d’être privilégiée en étant une femme blanche, valide, et suissesse. Sensibilisée aux causes de minorités, je tenterai d’inclure un maximum de monde si je prodigue des conseils. Toutefois, je vous prie de considérer mes éventuelles maladresses comme telles et non comme une volonté de nuire. Au contraire, j’aimerais unifier avec mes propos, alors n’hésitez pas à témoigner à votre tour en commentaire ou à me poser des questions. Je ferai au mieux pour vous répondre.

De la douleur au silence

Je « deviens une femme » un jour à 12 ans. Il y a du brun dans ma culotte (pas du bleu 8D) et je vais voir ma mère avec une drôle d’expression. Elle me dit « ça y est, t’y es » et elle me donne des bandes hygiéniques Always pour la journée, avant d’aller en acheter exprès pour moi.

Je parle peu de cette découverte, je pose assez peu de questions. C’est arrivé, tout simplement, et personne ne m’avertit. Ni de la fréquence « normale » du changement des bandes, ni de cette peur de la tâche entre les cours, ni des changements physiques énormes qui m’attendent. Et encore moins de la douleur.

Mon cycle est régulier, mais court (je ne le sais pas encore), et les deux premiers jours, mes règles sont hémorragiques (je ne le sais pas non plus). En plus de cela, il n’est pas rare que je sois pliée en deux pendant plusieurs heures. La prise de Spedifen 600mg se rend vite indispensable (je n’avale pas les médicaments à l’époque).

En bref, c’est normal de prendre un anti-inflammatoire pour pouvoir aller à l’école. C’est normal de préparer des paquets entiers de bandes hygiéniques et d’anticiper la moindre sortie. C’est normal de ne pas écouter ma fatigue, mes cernes violettes, et ma sensibilité.

En parallèle de ça, c’est normal que mes jambes grossissent au point que je n’arrive plus à mettre mes pantalons. C’est ma morphologie en 8, comme dit Madame Cordula. Mais j’apprends en 2024 que non, ce n’est pas normal. J’en ferai un autre article ces prochains mois, car c’est un autre sujet. 😉

Du silence à la pilule

Je ne me mets en couple sérieux qu’à 18 ans. Là, on me conseille de consulter un·e gynécologue pour prendre la pilule, en plus du préservatif (allez savoir pourquoi). Je choisis une femme, car je ne suis pas à l’aise avec les hommes.

Première consultation : je tombe sur une doctoresse froide, très peu à l’écoute de mes besoins, et qui me propose les standards de la pilule micro-dosée. Elle ne m’explique aucun effet secondaire détaillé dans la notice (j’en prends connaissance seule) et me dit simplement qu’il faut un mois pour que ce soit efficace.

Chéri et moi décidons d’attendre que la pilule fasse effet pour notre première fois. Et c’est une EFFROYABLE première fois. Si douloureuse pour moi. C’est normal, non, d’avoir mal ? Même qu’on saigne aussi, des fois. Je n’ai pas saigné. J’ai juste eu la sensation qu’on me déchirait pour entrer, et ce, malgré beaucoup d’amour et d’attentions.

De la pilule à la vestibulodynie

La deuxième fois est douloureuse aussi. La troisième également. Je commence à ne plus avoir envie de faire l’amour, et à le faire quand même parce que bon. Si vous êtes une femme, vous connaissez la chanson. Une chanson qu’on entend un peu trop souvent partout… ♥

Après une année, je décide quand même de retourner chez ma gynécologue ; je me trouve sèche en bas et j’apprends sur Internet que certaines pilules micro-dosées perturbent la flore. Elle m’accueille toujours froidement, n’a pas l’air de trouver ma douleur anormale et me dit : « Oui, on peut essayer de changer la pilule, mais je pense pas que c’est ça. » Les examens au spéculum sont terribles aussi, malgré le lubrifiant. Elle s’en fout. C’est quoi, alors ? Aucune réponse. Je change de pilule.

Surprise (non) : ça ne va pas vraiment mieux. La douleur est systématique, ça brûle, et ça reste après le rapport. Parfois, quand je suis assise en tailleur, ça brûle aussi. Personne n’a ça autour de moi (je ne creuse pas suffisamment la question, je dois dire, je suis assez pudique). Je dis alors que tout va bien… c’est faux sur ce plan. Le traumatisme s’installe, une zone grise avec mon conjoint aussi.

Les dernières consultations s’étant mal passées, je franchis le cap délicat de changer de gynécologue. Je vais chez celui de ma maman, qui est un homme, mais qui est respectueux. Il me prévient à l’examen, il s’excuse en me palpant les seins, et il trouve. Il trouve ENFIN ce que j’ai.

Ça s’appelle la vestibulite. Il m’explique que c’est un trouble qui touche beaucoup de femmes, mais dont on ne connaît pas la cause, malgré de nombreuses conférences sur le sujet. Il me tend un miroir, il appuie avec son coton sur le bord, là où ça brûle. Il me demande si c’est bien là, je lui dis oui. « C’est ça, c’est une vestibulite. » J’ai envie de pleurer de joie en pleine souffrance. Je ne suis pas folle. Ça existe et ça porte même un nom. Je le remercie et j’explique tout à mon conjoint. Je trouve plein de trucs sur Internet. Et je déchante un peu.

Parce que la vestibulite, ça existe, mais ça ne se soigne pas vraiment. On peut essayer des crèmes, des massages, de la physiothérapie, de l’hypnose, de la psychothérapie. J’ai TOUT essayé. Tout essayé pendant 7 longues années. Rien n’a fonctionné. Le trauma est resté ancré en moi. C’est de ma faute.

C’est mon chéri qui trouve la solution, un jour, sur un forum. Une femme témoigne, elle est atteinte, mais elle veut un enfant. Alors, elle arrête la pilule. Magie pour elle : plus de vestibulite. « Tu pourrais essayer. » me dit-il. Oui, essayons, on remettra le préservatif. Le gynécologue me dit que ça peut prendre un mois avant mon cycle naturel revienne.

Magie pour moi : ça prend littéralement deux semaines. Tout m’explose à la figure : surtout le désir. Ça allait un peu mieux avec l’anneau contraceptif, quand même, mais… là, je redécouvre le bonheur, plus étendu qu’est celui d’exister. Mon humeur va mieux, je ris, je vis. Et je n’ai plus mal. Plus mal DU TOUT.

On pourrait penser que tout s’arrange, alors, et c’est ce que j’ai dit pendant 7 ans. « Tout va s’arranger, un jour, quand j’aurai fait ci, quand j’aurai fait ça. » Mais le trauma reste, les habitudes, le corps. Tout m’explose à la figure, mais chéri ne comprend pas mes signaux. On se fait du mal sans le vouloir. Le désir repart… loin.

En parallèle, mes règles sont toujours hémorragiques (je ne le sais toujours pas), mon cycle est toujours court (je ne le sais toujours pas non plus). Et, petit à petit, d’autres douleurs s’installent, discrètes. Je les pense normales, elles aussi.

En 2017, on fait deux voyages de deux semaines. Les voyages me stressent énormément. Je pense alors choper la tourista, parce que j’ai la diarrhée pendant une semaine complète, à chaque fois. Je mange du poulet, du riz, des bananes pendant ce temps-là, je prends des médicaments. J’ai même une perfusion de Buscopan à l’hôpital de Tomar au Portugal.

Six ans plus tard, je fais le lien : ce sont en fait deux crises inflammatoires d’endométriose. Mais ça non plus, je ne le sais pas à ce moment-là.

De la vestibulodynie à l’endométriose

Pendant les deux ans qui suivent, je vais de temps en temps « attraper la gastro ». Mais la gastro, ça dure 3 jours, non ? La mienne, elle dure une semaine. Et particulièrement en été, quand il fait chaud. Bon, je ne dois pas supporter la chaleur, ça arrive…

En 2019, je consulte mon gynécologue pour des douleurs pendant l’ovulation. Je n’ai pas mal pendant les règles mais juste après, parfois, mes ovaires me lancent et je peine à déplier la jambe (surtout à gauche). Au moment du contrôle, il me montre un « corps jaune » tout à fait normal. C’est un follicule qui reste et qui est évacué après la libération de l’ovule. Rien à signaler.

« Vous prenez des anti-inflammatoires ? » il me demande. « Oui, mais je n’aime pas trop, alors j’évite. En plus, c’est pas top pour l’estomac et le foie… » je réponds. « Si vous avez mal, il faut les prendre. » Bouarf. OK Docteur. Je vais continuer à ne pas prendre. Après tout, rien d’anormal.

Mais la douleur s’est installée. Elle devient de plus en plus régulière, même si je tente de l’ignorer. Entre temps, il y a le COVID, le plus beau jour de ma vie (la signature d’un contrat pour mon roman), les difficultés avec chéri que personne ne voit (mais le reste va tellement bien). Il y a la vie, des morts, des naissances, le boulot et un autre voyage qui me stressent. Cette fois, pas de gastro, pourtant mon ventre qui gonfle, parfois, comme si j’étais enceinte sans l’être. J’ai des grosses jambes, mais pas un gros ventre. Je fais avec, dans mon coin.

Je ne veux pas entendre que j’ai la même chose que mes amies, le médecin n’a rien vu. Néanmoins, en automne 2022, ça devient ingérable. Dans ma tête, j’attrape gastro sur gastro. En plus, ça tombe sans arrêt en même temps que mes règles ! Je m’affaiblis, car on dépasse la semaine, et les bananes n’y changent rien. Et ces douleurs aux ovaires, qui deviennent constantes…

À cause du COVID et parce que j’ai un partenaire stable, je ne suis pas retournée faire de contrôle annuel depuis 2019. Je retourne alors voir mon gynécologue en 2022 pour quand même vérifier qu’il n’y a rien. Il me refait une échographie interne et ne semble d’abord pas inquiet… Mais je vois son visage se figer. Je le vois, je le connais maintenant. Il m’explique au bout de quelques secondes.

« Vous voyez ces masses noires, sur vos ovaires ? Ce sont des kystes, mais pas un SOPK. » Il me dit qu’il aimerait me revoir dans deux mois, pour voir s’ils évoluent. Et il pose le pronostic provisoire : « Ça ressemble à de l’endométriose. » Je le revois en décembre, je commence à considérer et à chercher d’autres témoignages. Tout correspond, même je ne trouve pas de lien avec ma digestion foireuse.

Dans l’attente, mon syndrome pré-menstruel s’intensifie, les douleurs aussi, les saignements également. Je commence à avoir plein de boutons énormes dans le dos, ils sont très douloureux. Lors du dernier rendez-vous avec mon gynécologue, il me dit que l’un des kystes a diminué, mais que l’autre a grossi. Il fait 2cm… un ovaire en fait entre 2 et 3.

Il me dit aussi qu’il part à la retraite, que ça l’embête de me trouver « plein de choses » et qu’il aurait aimé me suivre. Je pleure, il me tend des mouchoirs… Je l’aimais bien ce gynéco, moi, avec son diagnostic de vestibulite. Il fait le lien avec la gynécologue qui reprend le cabinet, m’affirme que c’est quelqu’un de très compétent. Elle pourra confirmer le diagnostic et m’envoyer faire des examens complémentaires. En attendant, j’ai très peur de consulter à nouveau chez une femme. Et je dois palier à la douleur comme je peux, il n’y a pas d’autre solution. Je peux encore vivre « normalement. »

De longs, très longs mois vont passer. Je vais devenir insupportable pour mes proches. Je vais commencer à détester mon corps, même si je l’observe et que je suis reconnaissante d’avoir un cycle régulier. Ça ne va plus me suffire, parce que je commence à avoir la « gastro » pendant 10 putains de jours. Tous les mois.

Ça arrive en plein Salon du Livre de Genève en mars 2023, où je passe d’excellents moments, mais aussi plusieurs heures sur les toilettes le matin. Je remarque que les crises arrivent du moment où je me lève, jusqu’à environ 10h30. Si vivre « normalement » c’est avoir peur de commencer la journée, non merci. Mais je souris, je dois attendre. Et puis, je me fais accompagner.

De l’endométriose aux méthodes et astuces

Je m’affaiblis et me dévitalise encore jusqu’au printemps. Mais l’Univers m’aide à agir au mieux. En passant à la pharmacie pour du Buscopan (le seul truc qui calme un peu mes crampes), je tombe sur le flyer d’une nutrithérapeute. Ça fait un moment que je voudrais essayer de jeûner, de voir si tout va bien. Et puis, je manque de fer aussi.

Oui, depuis 2014, une carence en fer s’est installée. D’abord, je devais prendre des compléments pendant 3 mois tous les 2 ans. Rapidement, les crises digestives m’ont empêchée d’assimiler le médicament, alors je suis restée en-dessous de la norme. La fatigue est devenue chronique.

Alors, je vais voir cette thérapeute et j’apprends plein de choses. En lui parlant du diagnostic provisoire, je suis contente qu’elle m’accompagne dans le projet d’une alimentation anti-inflammatoire. Dans ce cadre, j’arrive à me libérer de mon addiction au fromage, je consomme un peu moins de gluten, et je mets tout en place pour absorber de bonnes huiles. Elle me parle aussi de la cohérence cardiaque. Sans faire de miracles, je sens que ça m’aide déjà à reconsidérer mon corps, à en prendre soin pour qu’il soit plus fort à encaisser les chocs.

En parallèle, j’entame une thérapie chez une amie, qui me fait un bien fou. Son suivi holistique s’intègre à ma démarche et elle m’accompagne sur le chemin qui va devoir être le mien : creuser au plus profond pour trouver l’origine de cette maladie et la surmonter. Elle me guide vers moi-même, sans me bousculer, en écoutant mon corps. Je le laisse parler avec douceur et parfois un peu de surprise.

Enfin, une amie m’envoie le profil Instagram d’une copine à elle, qui parle d’endométriose. Je rencontre alors le Yin Yoga, qui me fait relâcher tellement de pression sur mon système nerveux ! Déréglé à cause de la douleur permanente, il retrouve de la sérénité pour la première fois depuis des mois. Ouf. Grande inspiration.

En mars, avant le Salon du Livre, je vais voir ma nouvelle gynécologue. Quand elle arrive, elle a un masque, mais ses yeux sourient. Sa première question : « Comment allez-vous ? » Je suis immédiatement rassurée. Durant l’entretien, elle m’écoute attentivement, sans me juger et sans donner de réponse immédiate. Pendant l’examen, elle m’explique tout et me montre que davantage de kystes sont présents, par rapport à décembre. Elle me confirme que c’est de l’endométriose.

Un long parcours d’examens complémentaires et invasifs m’attends. Mais ça y est, je sais ce que j’ai (à nouveau). Je pleure en sortant, je passe au boulot de mon chéri et je re-pleure dans ses bras. Je pleure aussi en faisant des messages vocaux à mes amies pour leur annoncer. Je me sens obligée de leur dire que je dois peut-être me faire opérer, étant donné l’avancée du monstre.

Des méthodes et astuces à l’opération

Je continue mes suivis et, en parallèle, je m’engage dans le long tunnel de la médecine. Prise de sang, IRM, rendez-vous en clinique, et échographie. Compléments alimentaires (je vous ai dit que je n’avalais pas les comprimés ?), images, rencontre avec un professeur et un chirurgien, et un tuyau dans les fesses pour vérifier si je n’en ai pas dans l’intestin… Tout ça avec mon épuisement, mes douleurs d’ovulation, ma culpabilité, et mes crampes digestives 10 jours par mois.

En plus, au premier rendez-vous, le Professeur m’annonce qu’en attendant tout ça, je dois reprendre la pilule. J’ai envie de lui dire : « Vous voulez vraiment me rajouter une douleur supplémentaire, après tout ce que je subis actuellement ? » Ça ne sort pas. On me dit que c’en est une exprès pour cette maladie et que ça freinera la progression d’ici l’opération. Je ne veux pas la prendre, mais je la prends quand même.

Un mois d’avril pendant lequel je n’ai pas mes règles, mais je saigne tous les jours du spotting. Un mois durant lequel, dès la première semaine, j’ai envie de mourir. Littéralement. Je vis au rez-de-chaussée, mais je veux sauter. J’aime mon travail, mais je veux crever. J’écris, mais ça n’a pas d’importance, je ne veux que décéder. Ces problèmes de santé m’épuisent, et pourtant, j’arrive à rationaliser : TOUT VA BIEN DANS MA VIE. Alors, pourquoi j’ai envie de mourir ? Même pendant ma dépression, à 12 ans, je n’avais que l’envie que ça s’arrête, et pas l’envie de mettre fin à mes jours.

Je m’accroche très très fort, à partir de là. Chaque heure, je me rappelle d’une belle chose qui m’arrive, je profite de chaque repas, de chaque conversation, et je m’y accroche comme un mollusque à son rocher en me répétant inlassablement que je n’ai pas de raison valable de vouloir mourir.

Sans mauvais jeu de mot, à la sortie de tout ça, je me sens lessivée. Quand j’arrive chez moi après la sonde dans les fesses, je me mets devant le miroir, j’ouvre mon pantalon pour libérer mon ventre, et je me regarde. Plutôt, je regarde mon corps. Je lui dis désolée de t’imposer tout ça. Courage, on a fait le pire, ça va aller.

Le bilan de l’endométriose profonde tombe au début du mois de mai : j’en ai PARTOUT. Sur les ovaires, principalement, sur les muscles qui soutiennent mon utérus, dans l’utérus, sur l’intestin aussi. Heureusement, pas dedans, sinon il aurait fallu enlever un bout. Ouf. Grande inpiration. Mais mes organes sont collés entre eux à cause de l’inflammation et les médecins craignent que ça se répande encore plus, notamment sur la vessie. Seule solution, au vu de mon confort de vie inexistant et des risques : l’opération.

Elle ne peut pas avoir lieu avant l’été. Je suis au bord des larmes et je parle de mon envie de mourir au Professeur en le suppliant d’arrêter cette pilule de malheur. Il me dit : « C’est un effet secondaire que beaucoup de patientes nous rapportent… »

… … … … … <– Je vous laisse deviner mes pensées, vous avez certainement eu les mêmes que moi.

« Je vais vous donner un traitement plus équilibré, qu’il faudra prendre jusqu’à l’opération. » poursuit-il. OK Docteur. Pas le choix.

Un autre mois s’écoule, je n’ai plus envie de mourir, je vais mieux… jusqu’au retour de la vestibulite. Oui, la fameuse, celle qui était partie en 2015. La même, la terrible. Mais je décide de serrer les dents. Je ne suis pas ravie de ces retrouvailles, c’est certain, et je supplie la secrétaire de la clinique de trouver une place avant l’été. Elle arrive à poser le 15 juin 2023. Je pleure de joie. Je pleure de joie de passer sur le billard… On aura tout vu.

De l’opération au mieux-être… vraiment ?

Je serre les dents très fort pendant ce dernier mois. J’annule ma présence à un salon littéraire, je me prépare avec la meilleure alimentation possible, les meilleures énergies, en tentant de surmonter mon stress. Heureusement, à part cette histoire de pilule, je me sens soutenue, accompagnée, et je suis sûre que tout ira bien.

L’anesthésiste me l’a dit la veille et, en plus, il me propose de la musique avant le dodo. Je choisis le dernier album de Kyo ; quelques notes de guitare électrique et je ferme les yeux.

Tout se passe en effet bien. L’intervention a duré 5 heures et non 3, car finalement, j’avais aussi de l’endométriose sur la vessie (donc la pilule n’a servi à rien, na !). Après des dizaines de trucs dans le sang et un réveil plus tard, je retrouve mes proches. Trois petits pansements, comme annoncé, un peu de peine à bouger, des gaz de l’Enfer dans la nuit (vive les bouillottes, merci Madame l’Infirmière ♥), mais une convalescence organisée. Un mois à la maison en pleine canicule, je ne vais pas me plaindre.

Je décide de laisser tomber la pilule au moment où j’entre à la clinique, mais le Professeur me dit que je ne dois pas trop saigner (oups, trop tard, mes règles attendaient de venir)… Même si j’ai encore envie de pleurer, j’accepte de la prendre jusqu’à mi-juillet, en me disant que ça m’aidera à cicatriser. Je n’ai surtout plus la force de me battre pour le moment.

Quand je sors de la clinique, je lève le nez vers le ciel et je profite de ses rayons sur ma peau.
Je suis vivante.

Mon corps ASSURE TELLEMENT pendant les quatre semaines qui suivent. Il me porte, me permet de faire plein de choses (surtout de dormir). Il m’offre un rétablissement et une cicatrisation dont je n’osais pas rêver. Surtout, les crampes ont déjà disparu. Complètement. C’est lui qui me murmure que tout va bien se passer, maintenant. Alors, je respire enfin. Je souris. Je regarde ce que j’aime, je lis un peu, je retombe amoureuse du même homme. Je me lève, je sors d’abord accompagnée de mon chéri. Quand on m’enlève les pansements, je trouve les cicatrices incroyablement belles.

À la maison, je place mes mains sur mon ventre et je murmure un merci.
« Je ne te laisserai plus jamais tomber. » on se dit, comme une promesse mutuelle.

J’ai mes règles après l’arrêt de la pilule, elles sont douces pour la première fois de ma vie, et je sors seule (pour la première fois depuis l’opération) pour donner mon livre à mes Ambassadrices. Il fait 37 degrés, je suis en robe, je cuis. Mais je suis vivante. Et je remercie mon corps d’avoir surmonté tout ça.

***

Mars 2025

Là aussi, on pourrait se dire que tout va mieux à partir de là. Malheureusement, ce n’est pas si simple. Car la maladie est encore dans mon corps. Les médecins ont bien bossé : ils ont sauvé mon ovaire droit, éliminé tous les kystes, nettoyé mes muscles, ma vessie et mon intestin, puis décollé mes organes. Toutefois, ils ne peuvent pas enlever l’adénomyose dans mon utérus. Il n’est pas complètement submergé, alors en accord avec moi, il a été décidé de laisser ça comme ça. Parce que je peux quand même avoir des enfants, et parce qu’on ne peut enlever l’adénomyose qu’en retirant l’organe entier.

En juin, ça fera deux ans que j’ai bénéficié de cette intervention salvatrice. Je n’ai plus de crampes digestives, mais pendant un temps, j’ai quand même eu des syndromes prémenstruels très violents, j’ai toujours mon petit endobelly de temps en temps, j’ai toujours des règles abondantes (même si elles ne sont plus hémorragiques) et un cycle court. J’ai dû avoir une perfusion de fer à cause d’une anémie (forcément, trois ans en manque de fer…) et j’ai des problèmes de peau dont je n’arrive pas à me débarrasser, même si ENFIN mes boutons ont disparu.

Je suis encore malade. Parfois, ce n’est pas facile à accepter ou à faire comprendre, parce que ça ne se voit pas. Surtout, les autres ne ressentent pas ce que je ressens. Mais j’ai décidé de ne plus m’épuiser à expliquer qui je suis ou ce que je fais et surtout pourquoi je le fais. En tout cas pas aux gens qui ne font plus un effort empathique. Je vis, de la manière qui me convient le mieux désormais.

Du mieux-être à l’écriture

Je continue ma thérapie holistique, nutritionnelle, et le Yin Yoga. Et j’ai bien l’impression que je commence à faire le tour. La colère envers la pilule disparaît gentiment, puisque j’utilise sa force pour m’engager. Écrire cet article m’a remuée, mais je tenais à le faire. Vous êtes quelques-unes à vous êtres reconnues dans les articles introductifs déjà partagés ici. C’est grâce à des témoignages que j’ai trouvé mes réponses, avant que la médecine ne m’en donne d’autres.

La colère laisse place à la douceur, la plupart du temps, et à la compréhension l’autre partie du temps. J’ai créé des liens, comme je le disais au début, et j’ai découvert notamment que :

  • l’endométriose peut provoquer des vestibulodynies (des recherches récentes montrent que la vestibulite n’est donc pas une inflammation chronique de l’entrée du vagin, mais plutôt un dérèglement du système nerveux et en particulier du système de la douleur, tiens tiens) ;
  • certaines formes d’endométriose sont indétectables et certaines femmes qui en ont peu ont très très mal (mes douleurs de règles dans l’adolescence venaient donc peut-être déjà de la maladie) ;
  • l’endométriose est souvent associée au lipœdème, une autre maladie hormonale et inflammatoire très méconnue, qui touche apparemment aussi 10% des femmes (mais c’est une autre histoire) ;
  • vu ma sensibilité aux hormones de synthèse, j’ai certainement fait une dépression à cause de mon entrée dans la « vie d’adulte » à 12 ans, et pas seulement à cause du rejet à l’école ou de mes blessures d’enfance.

La conclusion reste toujours la même : j’ai vraiment mal, je ne suis pas folle, et j’ai le meilleur corps du monde. J’ai encore bien des aventures à vous raconter, mais je pense m’arrêter ici, après votre demi-heure de lecture. On se retrouve la semaine prochaine pour un lien encore plus fort entre endométriose et écriture.

Si vous le sentez, partagez avec moi votre parcours avec l’endométriose en commentaires. Vous connaissez forcément une personne atteinte. 1 sur 10 (probablement + de personnes). 🙏🏻

À bientôt entre nos lignes. ♥

2 commentaires sur « [Endométriose] Mon parcours »

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