Chers amis des mots,
Je vous présente aujourd’hui « Sous une douce apparence » de Laetitia Dupont. Paru en janvier 2018, il s’agit d’un ouvrage auto-édité. Bien que le résumé soit clair sur ses intensions, je n’aurais jamais pensé tomber sur un roman d’utilité publique ! Je ne peux dès lors que remercier Instagram de m’avoir fait découvrir le profil de l’auteur, avec qui j’ai échangé pour lui acheter son bouquin et qui se révèle être l’une des femmes les plus courageuses à qui j’ai pu parler. Mais surtout merci à elle pour sa disponibilité, sa gentillesse et ce qu’elle nous dévoile à travers ses lignes à l’aide de son infinie sincérité. ♥
Retrouvez la micro-chronique complémentaire ici :
https://youtu.be/Xh8F4Jn64-0
Bref synopsis personnel : C’est l’histoire de Mélissa, qui se cache sous sa douce apparence pour ne pas montrer sa souffrance. Puis le jour où tout explose, où tout brûle, il lui faut ramasser les cendres pour se reconstruire des jambes solides. Celles qui lui permettront de se relever et d’avancer malgré le déni de son Institution.
Sujet/Résumé : Le résumé m’a attirée, il suscite le mystère, tout en dévoilant le burn out comme étant la ligne directrice du récit. En soi, le livre objet est soigné et professionnel (il reste de toutes petites coquilles, mais rien de dérangeant). Toutefois, il ne reflète pas l’intensité du récit, raison pour laquelle je n’attribue pas de 6. 😉 5.5/6
Narration : Rédigé à la première personne du singulier et au présent, le roman fait penser à un journal intime. Les chapitres sont découpés en dates, ce qui donne une bonne idée du temps qui s’écoule. Rythmé aussi par des citations ciblées et très bien choisies, les mots de l’auteur ont résonné en moi très très vite. Quelques maladresses se sont glissées çà et là, comme la description que Mélissa fait de son état physique lors de la première consultation (trop distanciée à mon goût) ou la découverte de son passé sous forme de dialogues (qui ralentissent le récit).
Malgré tout, il y a de magnifiques passages poétiques, descriptifs, présents comme il faut dans la descente aux Enfers du personnage. Introspective, l’histoire se veut immersive par les émotions, les aléas d’un quotidien dont on ne souhaite plus, avec un langage simple et accessible. La justesse est présente dans les phrases, à mon sens même pour les personnes qui n’auraient pas vécu le burn out.
Dans la narration, on retrouve la passion, l’envie et la nécessité d’écrire. L’auteur nous livre des tranches d’existence, d’un épisode compliqué duquel on la devine proche. Peut-on alors parler d’autofiction ? 5.5/6
Ambiance et Environnement : Dès les premières pages, on sent la surcharge nous envahir, en observant cette femme de 38 ans surnager tant bien que mal. Le récit commence dans l’humour, tout comme il est saupoudré de moments de bonheur avec les proches de la protagoniste. Malheureusement, on voit vite que cela ne suffira pas et Mélissa craque.
Tous les symptômes du brun out sont bien décrits. Non pas au sens théorique du terme, mais bien au sens de l’immersion. Nous n’avons pas le même emploi, les mêmes troubles, la même vie familiale. Or, je me suis reconnue dans chaque mots que l’auteur a posé là. Même lorsqu’elle décrivait les troubles alimentaires de Mélissa (que je n’ai pas eu à supporter), j’ai reconnu chaque difficulté, chaque idée noire, et ai pu m’y identifier, comprendre également que le burn out peut être allié à des comorbidités. Les pertes de mémoire sont flagrantes, les sollicitations incessantes des autres aussi, le fait de ne pas pouvoir dire non, de penser à son prochain d’abord, de ne pas pouvoir dormir alors qu’on en aurait besoin, tout autant que le besoin de sortir de ce quotidien par la marche.
Il en est de même pour les sentiments de culpabilité et de honte, qui sont présents tout au long du livre, dissimulés derrière un déni tenace, une non-légitimité dans la souffrance. Ne plus pouvoir sourire, devenir aigrie, ne plus rien supporter (le bruit, le travail, les gens, soi-même)… c’est pourtant bien là, non ? Et Laetitia Dupont nous fait saisir que, lorsqu’on se donne corps et âme au travail, on le fait car l’on pense servir une cause et une société juste. Celles-ci mêmes qui abusent, nous maltraitent, et nous demandent paradoxalement toujours plus. On en vient à lutter contre soi, contre ses convictions, parce que l’Institution ne nous donne pas les moyens. Alors les doux moments, ceux qui nous ont fait choisir ce métier, cette vocation, ne suffisent plus à rééquilibrer la balance. On voit les collègues souffrir, ils nous renvoient ce que nous sommes devenus. On pense à ce Soleil, à cette étoile qui nous guidait et qui n’est plus là pour nous aider, tandis qu’on a des personnes autour ; le soutien non plus ne suffit pas. Les gens nous renvoient l’image d’une personne qui prend des vacances, qui se la coule douce pendant que ceux qui restent galèrent. La peur inhérente à ce non-dit nous rend parano, frileux, asocial.
Puis le hasard place des thérapeute sur le chemin de Mélissa. Ils ne sont pas tous compétents, pourtant ils contribuent chacun à la réveiller, à lui faire accepter qu’elle doit redevenir qui elle est. Par le Reiki, l’art-thérapie, des refuges, la formation, Mélissa apprend qu’il est possible de retrouver la lumière.
Et ce récit raconte merveilleusement bien l’histoire de cette renaissance. 6/6
Personnages : Inutile de préciser que je me suis beaucoup identifiée à Mélissa. J’ai vu en ses rencontres et ses thérapeutes énormément de personnes bienveillantes de mon entourage.
J’émets toutefois une réserve sur les éloges qu’elle fait à son mari qui, certes, est soutenant et accepte son implication excessive au travail au détriment du couple, mais qui a besoin d’aide pour se choisir un pantalon et qui laisse Mélissa s’occuper des activités administratives du foyer… Quelques petites notes comme celles-ci ne m’ont pas trop plu et j’ignore si c’est la vision idéalisée de l’homme de la famille ou le côté estompé de ce personnage qui m’a laissé une petite amertume. J’ai d’ailleurs également trouvé les enfants effacés, bien que leur présence soit mentionnée plusieurs fois.
Les plus à même de comprendre la douleur de la personne « cramée » ne sont pas toujours les plus « utiles » au rétablissement et enfoncent parfois le clou sans que l’on se rende compte. J’ai trouvé que cela ne ressortait pas trop. 5/6
Fin surprenante ? Le sens de la fin est en demi-teinte, on peut se poser beaucoup de questions et j’ai apprécié avoir été dupée. 😊 Surtout, elle nous donne une leçon vitale, que j’ai apprise il y a longtemps, mais que je ne me suis pas assez répétée. J’y veillerai et je répandrai ce message partout autour de moi. 5.5/6
Moyenne : Que vous soyez touché par le burn out de près, de loin, ou que la thématique vous intéresse, c’est un livre à lire pour comprendre. Être dans la tête d’une personne qui veut et qui ne peut plus. On en ressort grandi, bouleversé par la maltraitance dont nous pouvons tous être victimes un jour. La société, le capitalisme, ce monde cruel de la productivité peut nous entraîner dans les bas-fonds lorsqu’on travaille avec l’Humain. Ce roman nous apprend que, même au bout du rouleau et avec des neurones en moins, on peut s’en sortir. Si on se souvient de ce qui nous amenés à travailler avec ce public. 5.5/6
Et vous ? Qu’auriez-vous envie de comprendre avec « Sous une douce apparence » ? Je me réjouis d’avoir vos avis. En attendant, à très bientôt entre nos lignes ! 😉
2 commentaires sur « Sous une douce apparence – Laetitia Dupont »